Deux jeux qui ne vous laissent jouer qu'à leurs conditions
Novembre 2004 : deux sorties de jeux video à gros budgets avec maints renforts publicitaires et marketing, Halo 2 édité par Microsoft (développé par Bungie), et Half Life 2 édité par Vivendi Universal Games (développé par Valve).
Première apparition du problème des formats, celui de la machine pour utiliser les jeux :
- Halo 2 est un jeu « exclusif Xbox », donc rien sans achat de la console Xbox (les consoles Playstation 2 de Sony et Game Cube de Nintendo ne savent pas lire le jeu) ;
- Half Life 2 est un jeu pour ordinateur avec Windows (rien pour les machines Apple ou celles avec Linux), avec certaines caractéristiques techniques de puissance ou de carte graphique par exemple (machines anciennes s'abstenir) et uniquement en DVD (pas de lecteur de DVD, pas de jeu).
Second problème plus gênant, les formats de contrôle inclus dans les jeux :
- avec Half Life 2, « Connexion Internet requise pour l'installation du jeu » indique un autocollant sur la boite : c'est un différent entre l'éditeur et le développeur qui est à l'origine de cette contrainte, avec l'acheteur pris entre les deux, et devant faire vérifier son jeu en ligne pour qu'il soit débloqué ;
- avec Halo 2, une machine correcte tu auras, ou en ligne tu ne joueras pas : les possesseurs de consoles modifiées pour faire tourner des jeux provenant d'autres consoles par exemple se sont retrouvés avec des comptes suspendus quand ils ont essayé de se connecter à Xbox live, le service de jeu en ligne de Microsoft.
On a donc un format de contrôle de l'outil, via notamment les fichiers DRM, qui modifie la donne : vous avez un appareil ou un jeu, mais vous ne pouvez en faire que ce que le constructeur vous autorise à faire, au risque de ne plus pouvoir l'utiliser.
On est bien loin des formats ouverts, et bien plus dans le domaine du contrôle ou de « l'analyse clientèle » peu explicitée, comme récemment pour les imprimantes Lexmark ou HP.
Sources et liens :
- L'article « Les sorties de Half Life 2 et Halo 2 : un exemple des dérives du "tout-DRM" », de Jean-Baptiste Soufron, le 14 novembre, http://soufron.free.fr/soufron-spip/article.php3?id_article=69
- L'article « Halo 2 : le succès... des DRM », de Hubert Guillaud, Internetactu, le 15 novembre, www.internetactu.net/index.php?p=5677
- L'article « Xbox Live : Halo 2 chasse les bidouilleurs » de Seb, Overgame, le 16 novembre, http://overgame.com/page/21231.htm
- Halo 2 : site officiel, www.halo2.com ; pages sur le site XBox, www.xbox.com/fr-FR/halo2/default.htm
- Half Life 2 : site officiel, en anglais, www.planethalflife.com/half-life2/
4 réactions
1 De florent - 07/12/2004, 10:30
> avec Halo 2, une machine correcte tu auras, où en ligne tu ne joueras pas
n'y aurait il pas un accent en trop sur le où ?
2 De Thierry Stoehr - 07/12/2004, 11:38
En effet, coquille... corrigée, merci !
3 De Psychozilla - 07/12/2004, 19:15
Une fois n'est pas coutume, je suis en désaccord avec un billet de ce blog (exception qui confirmerait la rêgle ? ;-), mais ne vois pas précisément le lien entre les formats ouverts, gages d'intéropérabilité, et la puissance de machine nécessaire pour faire tourner un logiciel.
Une grande partie du plaisir de certains jeux vidéo vient de la qualité du rendu graphique, d'effets toujours plus impressionnants, ce qui nécessite, pour vivre cette passion en dehors du monde des consoles, un PC dernier cri.
Ceci n'est pas l'affaire de tout le monde, je le comprends très bien, mais je trouverais particulièrement injuste de nous priver de ces plaisirs pour maintenir une compatibilité avec les machines de boulets qui voudraient essayer une fois l'an un First Person Shooter sur une bécane qui leur donne depuis 10 ans pleine satisfaction pour faire de la compta.
Suivre la course à la techno peut coûter cher sur PC, mais les consoles dernières génération (149 euro actuellement pour une XBox ou une PS2, soit environ la moitié d'une carte graphique haut de gamme) offrent une excellente alternative, car elles constituent une plateforme de développement stable durant toute leur durée de vie, et voient la qualité de leurs jeux s'améliorer d'année en année à mesure que les développeurs en extraient la substantifique moëlle.
Développer un jeu actuellement coûte très cher, aussi est-il important de soutenir les éditeurs tels qu'ID Software (Doom) et Epic-Atari (Unreal Tournament 2004) qui sortent leurs jeux pour Linux également en achetant leurs produits et en renvoyant le carton présent dans la boite pour leur faire savoir la raison de l'achat.
On notera d'ailleurs que des machines tournant sous des OS différents peuvent se retrouver dans des arènes de combat communes, les logiciels serveurs (souvent sous Linux) garantissant l'interopérabilité.
Le XBox live est dans le principe un excellent produit, très bien pensé et à l'ergonomie remarquable. Quiconque a déjà eu le plaisir de parties en ligne sur PC gâché par des joueurs ayant installé des softs de triche (visée automatique par exemple), comprendra facilement que ceux-ci ne sont pas forcément bienvenus en ligne sur consoles.
Ainsi, que des joueurs décident de pucer leur console, libre à eux, ils l'ont achetée et doivent pouvoir en faire ce qu'ils veulent. Mais ils doivent également comprendre qu'ils renoncent dans ce cas à participer au XBox live.
Un système parallèle de jeu en réseau existe d'ailleurs pour eux, le Kai, non certifié Microsoft car mis sur pieds par une communauté de hackers. Ils y trouveront des niveaux supplémentaires pour Halo 2 faits par des passionnés (une dizaine de niveaux actuellement), mais aucune garantie d'équité des softs tournant sur les consoles de leurs adversaires.
Le problème déontologique du XBox live viendrait plutôt de la vérification de présence de puce et de contenu de disque dur sur toute console connectée au réseau, que son/sa propriétaire soit abonné(e) au live ou pas...
En fait, plus que le nivellement des softs par le bas du parc installé, ou plus que l'ouverture du monde des consoles à la diversité chaotique du monde PC, un grand coup serait à jouer par les éditeurs, un coup qui mettrait en jeu... l'interopérabilité et les formats ouverts dans le jeu : la création d'interfaces logicielles permettant de passer sans à-coups d'un jeu à l'autre.
Prenons l'exemple d'un jeu à très fort succès actuel : GTA 3.
Pour ceux qui ne connaitraient pas, et en dehors de toute considération morale (le jeu est de toutes façons interdit aux moins de 18 ans), ils s'agit d'incarner la vie d'un truand qui doit faire fortune dans des milieux de gangs et mafieux.
Une des clés du succès de cette série tient à la liberté d'action offerte par l'univers du jeu : la ville où l'on joue est immense, et les missions ne s'enchaînent pas les unes après les autres comme un chapelet linéaire, mais c'est au joueur de choisir, selon son humeur du moment, chez qui -pour qui- il a envie de travailler, voire même de faire une pause honnête de carrière pour se consacrer à la conduite de taxis et/ou à la livraison de pizzas...
Eh bien cette liberté pourrait être plus grande encore avec... les formats ouverts.
Ainsi, dans GTA 3 Vice City, une mission aboutit à abattre un patron mafieu, et l'on se retrouve à récupérer pour nous sa luxueuse maison.
Imaginons que la machine sur laquelle je joue ait les SIMs installés : GTA 3 'transmet' au jeu les SIMs le plan de la maison dans un format standard, et je peux dès lors agrandir, décorer et équipper ma maison comme je le fais dans les SIMs ! Rien ne m'empêche de décider de me ranger des voitures et de mener dès lors la vie honnête d'un chauffeur de taxi dans GTA 3, qui dès qu'il est rentré chez lui dépense en mobilier et papiers peints ses deniers durement et honnêtement gagnés...
Le terrain de golf de GTA 3 vice city ne sert de cadre qu'à une mission où il s'agit là encore d'aller abbatre sur le fairway un pesonnage gênant ?
Imaginons que j'aie sur mon PC un jeu de golf tel que Microsoft Golf 2001, et que ce jeu soit compatible avec les standards ouverts d'interopérabilité : je pourrais, lorsque je passerais en voiture devant le club house du golf inclus dans la ville de GTA 3, décider de m'arrêter et faire un parcours...
Même suggestion avec les hélicos, les avions de l'aéroport et Flight Simulator, etc...
En fait, tout le monde y gagnerait : les joueurs, qui verraient leurs jeux s'enrichir des uns les autres, et les éditeurs, qui pourraient proposer leurs jeux en 'plug-ins' d'autres jeux (Bienvenue au golf de GTA 3. Ce terrain est compatible avec tous les jeux de golf des éditeurs respectant la norme d'inter-échanges XYZ...).
4 De Thierry Stoehr - 16/12/2004, 03:15
Merci pour ce long et intéressant commentaire argumenté, qui est repris dans ce billet : formats-ouverts.org/blog/...